5 janvier 2000

Marie-Francoise Le Borgne (1860-1942)

Marie-Francoise Le Borgne est née en 1860, à Landeleau. Ses parents, Guillaume Le Borgne (1831-1864) et Marie Allain (1833->1885) sont cultivateurs au Francen, propriété de la famille Le Borgne située a la sortie du bourg de Landeleau. 

Pour les siens, elle est Françoise. Quand elle naît, les communes ont l'obligation de créer une école, mais la scolarité obligatoire attendra 1882. Guillaume, son père, sait écrire. Il signe avec application l'acte de naissance de sa fille. Pas étonnant qu'on lui donne, à son tour, la chance d'apprendre à lire et à écrire. C'est son grand-père, Yves Le Borgne, qui finance sa scolarité à l'école des Sœurs ouverte au bourg vers 1870. 

Françoise se marie en premieres noces en 1882 avec Jean-Louis Hourmant qui habite Collorec où il est commerçant. Cette vocation de commerçants des Hourmant a duré longtemps : dans les années 1950/60, il y avait encore à Collorec, dans les maisons basses qui font face à l'église, une boulangerie-épicerie-café, tenue par une famille Hourmant. 


Elevée au Francen auprès de parents cultivateurs, Françoise devient commerçante en se mariant. Jeune femme "instruite" (comme on disait alors), entreprenante, courageuse, débrouillarde, elle n'hésite pas à conduire un char-à-banc jusqu'à Morlaix, où elle va s'approvisionner. Elle s'y fait des relations amicales. Elle s'intéresse à la cuisine et apprend des recettes qui ont alors peu cours a Collorec où on se nourrit essentiellement de lard, de pommes de terre et de bouillie d'avoine. Elle fait à manger aux étrangers de passage. Cette cuisine atypique et pourtant patrimoniale séduit justement le conteur breton Anatole Le Braz qui fera écho de son passage chez Francoise dans l'une de ses chroniques.

Françoise et Jean-Louis auront deux enfants : Marie-Françoise (1885-1931), que tout le monde appellera Marie naît en 1885. Son frere Guillaume (1887-1973) la suivra deux ans plus tard. Mais Jean-Louis décède en 1892. Françoise a alors 32 ans, la petite Marie 7 ans et Guillaume 5 ans. Françoise ne reste pas seule et en 1893, elle épouse en secondes noces Yves-Jean Martin, cultivateur au Cosquer, autre hameau de Collorec. (Re)devenue cultivatrice puisqu'elle rejoint son mari au Cosquer, elle aura avec lui trois autres enfants : Yves (sans doute décede jeune), Michel et Marie-Anne (1899-1939). 

Adolescents a la naissance de leurs demi-freres, Marie et Guillaume Hourmant poursuivront leur education grace a la tante de Yves-Jean Martin, Supérieure au couvent de Carhaix, qui va s'occuper de leur scolarité. A ses 17 ans, Marie épouse Mathurin Guyomar avec qui elle aura notamment une fille, Marie-Anne Guyomar (la grand-mere de Marie-Anne). Ils reprennent la ferme familiale du Francen. Son frère Guillaume, qui ne n'appréciait guerre la façon dont son beau-pere traitait sa mere, préféra quitter le berceau familiale, et devenir commerçant. Il épousera en premiere noce Josephine Salaun, puis apres le deces de celle-ci en 1917, il se remarie em 1920 avec Marguerite Cam. Guillaume et son neveu Jean Cam creeront un magasin de tissus qui deviendra Les Magasins Jean, puis Rallye en 1945...

Le 21 juin 1920, Michel Martin, alors tailleur d'habits, épouse la fille du maire de Collorec, Louise Corbel, tandis que sa soeur Marie-Anne épouse Joseph Le Clech.  Il s'agit certes d'un double-mariage, mais il fut celebre en très grandes pompes (certains preterent des velléités de reelection au pere de la mariée). Au total, quelques 1800 personnes auraient assiste aux celebrations qui s'étalèrent sur trois jours. Les festivités eurent lieu à Collorec dans le verger. On y avait creusé des tranchées et mis des planches pour asseoir les invités, tandis qu'un char à banc passait dans les rangs pour déposer toute la nourriture et le cidre... Les invités venaient avec leurs couverts et les familles avaient récupéré tous les chaudrons des fermes de Landeleau et Collorec pour pouvoir assurer la cuisines: tripes, pommes de terre, far breton en dessert... Le tout cuit au feu de bois. Les chanteurs se trouvent tous en haut de la photo avec leurs chapeaux ronds.

La famille proche
Marie-Anne Martin et son mari Joseph Clech

Proches de la retraite, Françoise Le Borgne et son mari vont laisser l'exploitation de la ferme du Cosquer à leur fils, Michel Martin et sa femme Louise Corbel peu de temps apres leur mariage. Marie-Anne, elle, prendra la relai de sa demie-soeur aînée quand celle-ci quitte Le Francen au deces de son epoux, Mathurin, en 1921. 

En 1929, Yves Jean Martin decede, et en 1931, Francoise rejoind la ferme du Francen pour y finir ses jours. Françoise Le Borgne vivra âgée et survivra à ses deux filles. Elle deviendra avec les ans la vénérable Grand'Mère du Francen. Elle est encore présente sur la photo faite en 1943 à l'occasion l'ordination de son petit-fils, Michel. Elle décédera peu de temps apres, a l'age de 83 ans.

 

Sources: Michel Guyomar, Marie-Francoise Petillon


4 janvier 2000

Silvain Delage (1858-1936) et Francoise Micat (1862-1938)

(mise a jour: 12/11/2022)

Né le 15 mai 1858 a Malicornay (Indre), Silvain Delage est le fils de Silvain Delage (1830-1908) et Marie Plicot (1834-1916). Il est le second de dix enfants nes entre 1856 et 1879 - meme si deux d'entre eux ne fêteront pas leur premier anniversaire. 


Dans cette famille d'agriculteurs berrichons, Silvain est le premier fils, ce qui explique peut etre pourquoi il a hérité du nom de son père... Cependant personne ne l'appelait Silvain: il était surnommé par tous le « Père Maurice ». C’est d’ailleurs pour cela qu'un des cousins de Michelle s’appelle Maurice. A sa naissance, ses parents ont décidé de l’appeler ainsi en hommage a l'arrière-grand-père. Sauf qu'en l'annonçant fièrement a René Delage, celui-ci a éclaté de rire et leur a dit que le vrai prénom de son père était Silvain et non Maurice... Dans la famille, personne n’a pu confirmer pour quelles raisons on lui donnait ce surnom, meme si une reference littéraire pourrait etre probable. 


 Silvain epousa a Gournay (Indre) Francoise Micat le 2 mars 1886, et aura avec elle six enfants, dont Rene, Auguste Delage (1903-1992) qui est notre rattachement a cette famille. Rene est le second garçon mais aussi le dernier de la fratrie. Deux de ses aines ont la particularité d'avoir épousé les membres d'une autre fratrie, puisque Lucienne et Pierre DELAGE ont épousé respectivement Emile et Marie BURAT... le même jour, le 24 juin 1922 à Bazaiges (Indre). Une autre soeur, Lucienne, aura un destin plus funeste puisqu'elle decedera en 1937 avec son mari Paul Villeneuve dans l'incendie de leur ferme.

 Pour en revenir a Silvain "Pere Maurice" Delage, il était un homme pondéré, plutôt calme et respecté. Il était connu pour avoir « un don ». Il soignait à la fois les hommes et les betes de toutes sortes de choses. Dans cette partie de la France - le Berry - très touchée par les anciennes croyances, il n’est pas rare, encore de nos jours, que l’on trouve des histoires assez étranges. N'est-ce pas la le decor des romans de George Sand par exemple... Silvain Delage avait un carnet sur lequel il notait les formules à prononcer pour enrayer telle ou telle maladie. Ce carnet a survécu aux années comme on le verra plus bas. 

Silvain Delage avait une santé de fer. Il n’était jamais malade. Lorsque pour la premiere fois de sa vie, en 1936, il s’est retrouvé souffrant, cloué au lit, il a refusé de voir le docteur. Quand celui-ci arrivait a la ferme, Silvain lui tournait le dos pour l'ignorer. Il a ainsi préféré se laisser mourir, partant du principe que il aurait ete incapable de se suffire à lui-même s’il avait seul. Il ne voulait ni survivre à sa femme, Françoise Micat (1862-1938), ni être un poids pour ses enfants. Il est décédé le 23 novembre 1936 à l’âge de 78 ans. Françoise Micat lui a survécu deux années.

Les origines de la famille Delage.

Du plus loin que l’on fasse des recherches, les ascendants d’Auguste DELAGE sont tous originaires du département de l’Indre, ancienne province du Berry et plus particulièrement du Bas-Berry, proche de la célèbre Vallée Noire, chère à Georges Sand. Une seule branche vient de la paroisse de Méasnes, dans le département de la Creuse, limitrophe de l’Indre. 

Si on reste sur la lignée directe des « Delage », le berceau de cette famille est donc la paroisse de Chavin où l’on trouve le premier acte connu, c’est-à-dire celui de baptême de Gabriel DELAGE, le 1er avril 1668, fils d’Etienne DELAGE et d’Andrée GIRAUD. 

Acte de baptême de Gabriel Delage (1668 – 1736) datant du 1/4/1668
Ensuite, entre 1808 et 1814, la famille se déplace de quelques kilomètres pour s'installer à Malicornay, par l'entremise de Léonard DELAGE, né à Chavin le 19 mai 1780 et décédé le 15 mars 1845 à Malicornay. Une de ses filles, Marguerite, y était déjà née en 1804, mais en 1807, des jumeaux naquirent à Chavin, avant que ses derniers enfants, à partir de 1814, naissent à Malicornay. Il faudra attendre la fin du 19ème et le début du 20ème siècle pour que Silvain "Pere Maurice" DELAGE, né à Malicornay le 15 mai 1858, ne se déplace vers la commune de Bazaiges, où il y est décédé le 23 novembre 1936.

Hormis la famille DELAGE, celles associées par mariage venaient d’autres paroisses ou communes du département de l’Indre ou de la Creuse. Le Berry est donc indéniablement le berceau de cette partie de la famille qui n'a finalement commence a se disperser qu'avec la generation de Rene, Auguste Delage au milieu du XXe siècle.

Le carnet du Pere Maurice.

Pour apporter plus de couleur au profil atypique de Silvain Delage, je voudrais conclure en citant littéralement celui qui a le plus oeuvré a documenter la généalogie de cette branche de notre famille, Alain Delage. Il nous relate comment, étant enfant, il était allé en vacances avec son père dans la ferme familiale de Chambord ou il avait prêté une oreille attentive aux discussions, tantôt en Français, tantôt en patois :
 
"Parmi toutes ces conversations, un thème, plus particulièrement, mettait en éveil toutes mes facultés d'imagination. Son objet : des dons surnaturels. Son acteur : Silvain Delage, mon arrière grand-père. Il avait plusieurs dons relatifs aux hommes, mais également aux animaux. On ne peut pas dire qu'il était guérisseur au sens général du terme, mais il avait la possibilité de soulager certains maux, ou toutefois de prévenir certains tourments. L'un de mes préférés concernait les vaches. 

J'ai appris lors d'une de ces soirées mémorable que si une vache mangeait de la luzerne, elle avait de grande chance de gonfler et de mourir étouffée par la fermentation et les gaz que provoquait cette herbe dans son estomac. Je vous ai dit que j'étais citadin ! Or Silvain, lorsqu'il faisait paître ses animaux dans un champ où il suspectait la présence de luzerne, avant de les laisser entrer, disait quelques mots et les vaches pouvaient batifoler à leur guise et se remplir la panse de cet aliment sans ne jamais subir aucun dommage. Pourtant un jour, alors qu'il était en train de dire ses incantations habituelles, un voisin l'ayant interrompu dans son travail, une vache est entrée avant qu'il n'ait fini et à commencé a brouter l'herbe interdite. Mal lui en à pris puisque elle en est morte. 

Toutes ces histoires me donnaient l'image d'un aïeul secret, un peu sorcier, et il n'aurait pas fallu me pousser beaucoup pour que je l'imagine en train de faire quelques potions particulières se rapprochant plus de Merlin l'Enchanteur que de Dieu le Père. Toutefois, la popularité qu'il avait dans le pays, l'amabilité et la serviabilité qu'on lui attribuait me remettaient les pieds sur terre. J'étais dans un endroit au nom prestigieux et mon ancêtre avait des pouvoirs d'un autre temps, et tout cela au pays des "jeteurs de sorts " cher à George Sand. Quoi de plus fabuleux pour un gamin plein d'imagination. Mais le pompon de cette histoire, c'est lorsque j'ai appris qu'il avait consigné sur un petit carnet ses secrets et ses prières. J'ai donc immédiatement posé la question à mon grand-oncle Pierre, pour savoir s'il était en possession de cette relique. La réponse fut décevante puisqu'il ne se rappelait plus du tout où cet objet, pièce à conviction d'une histoire fabuleuse d'un autre temps, pouvait bien se trouver. 

Pendant de nombreuses années, j'ai reposé la même question à plusieurs membres de la famille sans plus de succès. Loin d'être une obsession chaque fois que je pensais à mon arrière-grand-père, je l'imaginais en train d'écrire sur ce calepin tous les mystères de la création. Dommage, il fallait me rendre à l'évidence, le carnet avait bel et bien disparu, et je ne pouvais que raconter à qui voulu l'entendre, que j'avais un aïeul qui sortait de l'ordinaire "puisqu'il pouvait sauver les vaches de la luzerne ". 

Malgré cette déception, ce personnage me fascinait quand même, car il avait une autre particularité beaucoup plus terre à terre. Bien que sur son état civil, il ait le prénom de Silvain, tout le monde l'appelait le "Père Maurice ". Là aussi, aucune explication formelle sur cette identité, et pas l'ombre d'une piste. Silvain Delage était vraiment un être sortant de l'ordinaire. Or quelques années plus tard (au moins trente), alors que je faisais mes recherches généalogiques, et afin de me mettre dans l'ambiance d'un Berry que je connaissais très peu, j'ai décidé de lire quelques romans champêtres de George Sand, écrivaine par excellence de cette partie de l'Indre où se trouve le berceau de notre famille le long de la Creuse en amont d'Argenton. Le premier qui me vint à l'esprit, fut "la mare au diable ". Et quelle ne fut pas ma surprise de découvrir au chapitre III, que le beau-père, un bien brave homme, du personnage principal Germain le laboureur, s'appelait "le Père Maurice ". 

A cet instant, on a l'impression que le monde s'arrête, l'imagination va bon train, les hypothèses se bousculent et l'esprit vagabonde aux portes du rêve. J'ai donc essayé de recouper la vie de George Sand, son oeuvre et la vie de Silvain Delage. La première constatation est facile puisque l'écrivain n'a pas pu s'inspirer de Silvain pour écrire son livre. En effet, mon arrière grand-père est né en 1858, c'est à dire treize ans après la parution de "la mare au diable". Par contre, le contraire peut être plus intéressant. Il se peut qu'on lui ait donné ce surnom parce qu'il ressemblait moralement au personnage. 

Et là, on trouve quelques coïncidences. George Sand habitait à Nohant, où elle est décédée en 1876, à une trentaine de kilomètres de Malicornay, village natal de Silvain, mais elle a passé beaucoup de temps, et surtout écrit, dans sa maison "Algira" de Gargilesse, où elle a choisi ce village comme cadre de plusieurs de ses romans. Un vie intellectuelle s'était installé dans ce "plus beau village de France ". 

Or à partir de 1895, jusqu'en 1912, date d'achat de la ferme de "Chambord ", Silvain Delage a vécu dans ce lieu (son fils Pierre y est né en 1899, sa mère Marie Plicot y est décédée en 1916 et sa soeur Marie, Angélique, épouse de Joseph Brunaud, y a vécu à partir des années 1880 et y est décédée en 1930). 

Près de vingt années passées dans ce même lieu pouvait créer des liens affectifs importants. Il n'en fallait pas plus pour qu'à trente huit ans, l'imagination du gosse de huit ans ne fasse encore des ravages. Il se peut que face à la sympathie de Silvain, un érudit de Gargilesse, amateur de l'oeuvre de George Sand, ne l'ait comparé un jour au personnage de "La Mare au Diable ", et l'ait surnommé "le père Maurice". 

Rien ne me permet de pouvoir affirmer cette théorie, et surtout prouver qu'elle est vrai, et je doute pouvoir y parvenir, mais elle me séduit au point que je commence à y croire. La meilleure façon étant d'en parler, c'est ce que j'ai fait le lendemain des retrouvailles du 11 juin 2000, alors que nous étions attablés, en famille, dans la grande salle à manger de "Chambord ". Mon récit parut plaire à plusieurs personnes, et je m'évertuais à expliquer qu'il n'était pas possible que Silvain ait pu se trouver ce surnom tout seul car il n'avait pas dû lire "La Mare au Diable ", le niveau scolaire de cette époque était beaucoup plus bas qu'aujourd'hui, il devait savoir tout juste écrire. 

Bien mal m'en pris car ma cousine Nicole, épouse de Jean-Pierre Gautron, maître des lieux et arrière petit fils comme moi de Silvain Delage, se leva et me remis une enveloppe qu'elle avait trouvé au fond d'un tiroir d'un vieux meuble de la ferme et qui contenait quelques feuilles jaunies sur lesquelles s'alignaient des mots écris d'une écriture régulière appliquée, voire émouvante. 

Je commençais à lire : "Pour la vipère, je sais que Jésus-Christ, le Roi de Gloire vient dans la paix et que le verbe s'est fait chair...". Je m'arrêtais de lire. J'avais la preuve que Silvain savait écrire, mais surtout, j'avais entre les mains la relique tant espérée à huit ans : "le carnet du Père Maurice "."

Sources: Alain Delage
  

2 janvier 2000

Jean, Felicien Reby (1884-1970) et Marie Villard (1885-1944)

(Mise a jour le 22/12/2021)

Ne le 11/08/1884 à Dun-le-Palleteau (Creuse), Jean, Félicien Reby est le fils de François REBY (1853-?) et Augustine AJAME (1858-?). Bien que son prénom officiel fût Jean, il répondait à celui de Félicien. Il épouse Marie Villard à Dun-Le-Paleteau (devenu Dun-le-Palestel en 1952). Elle est la fille d'Anne Eteffe et de François Delâge, dont on fera le portrait plus tard.

Marie Villard


Jean, Félicien Reby était couvreur, et plus particulièrement ferblantier, à savoir un expert du travail du fer blanc. Originaire de La Celle Dunoise (nord de la Creuse), il a vécu, avec son épouse Marie Villard à Dun puis Eguzon (Indre). Ces communes sont proches d'une vingtaine de kilomètres, et c'est lui qui, lors de travaux sur le clocher de l'église d'Eguzon, fut chargé de fixer le coq à son sommet.


Jean, Félicien REBY avait toujours rêvé d'avoir un garçon, mais le destin ne voulut pas lui donner satisfaction. S'il fut heureux le 27 mars 1928 de pouvoir, enfin, serrer dans ses bras René Bernard REBY, un an plus tard le bébé fut emporté par une méningite, et décéda le 28 juin 1929. Un autre garçon subit le même sort mais les registres sont évasifs a ce sujet. Qu'à cela ne tienne, il eut une grande famille de filles, au caractère bien trempé. 

Le couple a en effet eu 7 filles. Entre 1908 et 1917 les quatre premières sont nées à Dun-le-Paleteau et les trois suivantes à Eguzon. Il semble que Marie Villard accouchait chez ses parents plutôt que chez elle. En effet, les parents de Marie Villard vivaient à Dun jusqu'au décès du père, François Delâge, le 9 septembre 1917. Sa mère est ensuite venue vivre à Eguzon où elle décédera le 30 juillet 1924. D'après les actes de naissances, Denise Reby qui est présente dans notre arbre est née en 1910 à Dun. Il est mentionné sur l’acte que les parents sont « domiciliés à Eguzon (Indre) de passage à Dun ». 

Félicien fut appelé sous les drapeaux le 6 aout 1914. Il rejoint tout d’abord le camp de tranchee de Paris avant d’aller au front du 21 janvier 1915 au 16 octobre 1916 date à laquelle il est transféré dans le 19e escadron du train. Il passera ensuite à l’infanterie territoriale, puis au génie, avant d’être démobilisé en février 1919. Il se retire alors Eguzon.

Fiche Matriculaire 

Il pensait qu’un fils reprendrait son activité, mais a la mort de celui-ci, il décida de prendre sa retraite de couvreur, qui était un travail à haut risque. Leur petite-fille, Annette Delage, racontait qu’après le décès des deux garçons au début des années 1930, son frère, Jean Delage, alors bébé, avait été placé chez ses grand parents maternels, à Eguzon. Marie Villard avait fait une dépression et la présence de Jean, né en 1931, étant le plus proche de ses deux enfants décédés, lui aurait redonné goût à la vie.

Marie Villard décèdera le 22 mars 1944. Son mari lui survivra jusqu’au 30 janvier 1970. Ils reposent tous les deux à Eguzon.

Les filles du couple:

Les filles REBY avec leurs époux respectifs, de gauche à droite:
Alice, Denise, Madeleine, Jeanne, Félicien REBY, Blanche, Marcelle et Suzanne

Voici quelques anecdotes concernant les filles du couple Jean, Félicien REBY et Marie VILLARD, et leurs caractères:
  • Leur fille ainée, ALICE était couturière. Habitant sur la route du lac, à Eguzon, elle avait pris en grippe une cousine qu'elle soupçonnait de passer devant sa maison, et la fenêtre de son atelier, pour la narguer. Vrai ou faux, le fait est qu'un jour qu'elle était occupée à essayer une robe à une de ses clientes, la cousine en question se présente à l'horizon. N'écoutant que son inimitié, Alice se précipite alors vers l'entrée, et, s'emparant de ce qui lui passe sous la main, en l'occurrence un parapluie, ouvre la porte d'entrée et l'abat sur la tête de la passante sans même lui adresser la moindre explication, après quoi, elle retourne poursuivre son essayage sans se soucier de l'état dans lequel était sa victime.
  • La seconde fille, DENISE, possédait, avec son mari René DELAGE, à Narbonne (Aude), un hôtel-restaurant qu'ils avaient mis en gérance. Or le gérant ayant omis de payer certains de ses fournisseurs, un huissier se présenta, un jour, bien habillé et chapeau haut de forme sur la tête, à leur domicile pour présenter les dettes du gérant et demander leur paiement. Pendant de longues minutes, les explications entre René DELAGE et l'huissier n'apportèrent rien de nouveau. L'huissier voulait être payé et René refusait de s'y soumettre. La conversation était devenue totalement stérile quand René se vit écarté vivement par Denise qui empoigna le chapeau de l'huissier et le lui enfonça vigoureusement sur la tête, en lui notifiant comme paiement : "trois fois merde, petit con, ça fait ton compte !", au point que celui-ci se retrouva avec la bordure du chapeau autour du cou et simplement la calotte sur la tête. On ne sait pas si l'huissier avait donné suite à cette … agression !
  • La troisième, MADELEINE, fréquentait celui qui allait devenir son époux, Henri BOURBONNAIS. Alors qu'ils étaient sur la piste de danse d'un bal populaire, Madeleine fut bousculée par un homme à qui Henri, qui était de petite taille, demanda de s'excuser auprès de sa cavalière. L'homme en question prit mal la remarque et commença à être désobligeant avec Henri, profitant probablement de sa supériorité physique.  C'est à cet instant que Madeleine, plus corpulente qu'Henri, lui posa la main sur l'épaule en lui signifiant "laisse, Henri, il est pour moi", et en un tour de main, ou plutôt de poing, elle fit comprendre sa désapprobation à l'homme surpris par la situation. Autre anecdote, remontant cette fois a la seconde Guerre Mondiale: Henri ayant ete fait prisonnier en Allemagne, Madeleine aurait traverse le pays puis la frontiere, afin d'aider celui-ci a s'evader... avec succes.
  • La quatrième, JEANNE, avait épousé Victor THÉRET. Ce dernier avait débuté sa carrière professionnelle comme garçon de café et possédait une brasserie à Châteauroux (Indre). Il fabriquait sa bière ou sa limonade. Ses neveux avaient l'habitude de lui chaparder de la bière et lorsqu'ils ne pouvaient pas terminer de boire leur larcin, ils allaient le déverser sous le poitrail du cheval, qui était utilisé pour les livraisons, afin de faire croire qu'il avait uriné. Lorsque la seconde guerre mondiale éclata, Victor fut mobilisé et fait prisonnier en Allemagne où il travaillait dans une ferme. A son retour, la brasserie avait été vendue, et Jeanne était entrée dans les Postes et Télécommunications grâce au… piston d'un receveur haut placé. Lors d'une conversation, alors que Jeanne vint à parler de la guerre, Victor lui rétorqua : "S'il te plait Jeanne, TA guerre, on la connait ! ".
  • Nous n'avons pas d'anecdotes sur les trois autres, BLANCHE, MARCELLE et SUZANNE, mais elles ont toutes un caractère bien trempé... 
Source principale: Alain Delage

1 janvier 2000

François DELÂGE (1849-1917) et Anne ETEFFE (1857-1924)

Un couple vivant maritalement 

Compte tenu de la presence de Delage plus tard dans la lignee, il est deja intrigant que de trouver un François DELÂGE a ce niveau de l'arbre. Mais il est encore plus etonnant que celui-ci soit renseigne comme etant le père de Marie VILLARD.  

En effet, la mère de Marie VILLARD, Anne ETEFFE (ou Autef, suivant les actes), est née le 13 février 1857 à Saint Ouën-sur-Gartempe, dans le Haute Vienne. Elle épouse François VILLARD, de 13 ans son aîné, le 12 juin 1879 à Roussac (Haute Vienne), avec qui elle a une fille. Anne et François VILLARD sont domestiques dans une maison "bourgeoise", les "Delâge".  Le fils de la maison, François DELÂGE, né le 31 mars 1849 à Rancon (Haute Vienne) s'éprend de la domestique, Anne, et décide d'abandonner les siens, et une certaine aisance matérielle, pour vivre avec elle.

De son côté, Anne ETEFFE part avec François DELÂGE en abandonnant son mari. Anne ETEFFE et François DELÂGE s'installent dans le canton de Dun-le-Palleteau, au nord de la Creuse, à la limite de l'Indre.  Anne ETEFFE ne divorcera pas et par consequent n'épousera jamais François DELÂGE. Ils auront ensemble 4 enfants: Alfred, Marie, Eugénie et Emile qui porteront légalement le patronyme "Villard".

A titre d'exemple, voici un extrait de la déclaration de naissance de Marie VILLARD, future épouse de Jean, Félicien REBY :
"L'an 1885 et le 30 novembre, à sept heure du soir, par devant nous… officier de l'état civil de la commune de La Chapelle Balouë, … est comparu le sieur Delâge François, surveillant, âgé de 37 ans, demeurant à La Chapelle Balouë, lequel nous a présenté un enfant du sexe féminin, né ce matin à neuf heures au bourg de La Chapelle Balouë, fille de Villard (François), domestique, âgé de 41 ans, demeurant à Roussac, canton de Nantiat (Haute Vienne) et de Eteffe (Anne), ménagère, âgée de 28 ans, demeurant avec le déclarant au bourg chef-lieu de cette commune et auquel il a déclaré donner le prénom de Marie…".  
Ainsi, François DELÂGE déclarait ses enfants biologiques sous le nom legal de sa compagne.  Cette situation n'a rien d'extraordinaire car à l'époque le nom du mari de l'accouchée se substituait automatiquement au nom du véritable père même si celui-ci désirait reconnaître l'enfant.  

Cela donne des situations ubuesques dans les registres généalogiques. Lorsque François DELÂGE est décédé, le 9 septembre 1917 à Dun-le-Palleteau, c'est un "voisin" (dixit l'acte) qui a fait la déclaration en mairie. Et ce voisin n'était autre que son gendre Jean, Félicien REBY, 33 ans, couvreur qui declara le defunt, le pere de son epouse... Celibataire et sans enfants. Dans la meme veine, lorsque la fille de François DELÂGE et d'Anne ETEFFE, Marie VILLARD a voulu épouser, en 1907, Jean, Félicien REBY, elle a été obligé de demander le consentement à son pere legitime François VILLARD. Enfin, comble des curiosites administratives, leur fils Alfred VILLARD, né le 5 juillet 1882 à La Chapelle Balouë (Creuse), est mobilisé en 1914 avant d'etre tué par l'ennemi au Bois de Béthelamville (Meuse), le 25 janvier 1917. Son acte de décès est transcrit sur les registres de la commune de résidence, en l'occurrence Dun-le-Palleteau, le 2 juin 1917 et rédigé ainsi :
"… acte de décès de Delage Alfred, soldat de deuxième classe au 342ème régiment d'infanterie, sixième compagnie de mitrailleuse, classe 1902, n° matricule 333 au recrutement de Guéret…"  
Alfred DELAGE! Ce même nom est inscrit sur le Monument aux Morts de la commune de Dun-le-Palestel (Creuse). Son livret militaire est également renseigné de la même manière, mais un rectificatif de l'acte de décès et du livret intervient en date du 18 octobre 1923, et il est inscrit :  " Le nom patronyme du défunt n'est pas Delage. … Le défunt doit être dénommé Villard. … Ce militaire étant époux de Dupain Marie, Marguerite, Julie".  Cette modification de nom est pour le moins étrange car, que François DELÂGE déclare ses propres enfants sous le nom du mari officiel de sa compagne, est déjà drôle, mais que ses enfants portent quotidiennement le nom de "Delâge" alors qu'ils s'appellent légalement "Villard" au point de tromper même les autorités militaires, est encore plus étrange. Le Monument aux Morts reste (pour l'instant) fidele au pere biologique. 


Pour quelles raisons Anne ETEFFE n'a jamais divorcé de François VILLARD ? Le divorce, instauré sous la Révolution française, avait été abrogé sous Louis XVIII, par le décret du 8 mai 1816 et qu’il avait été rétabli le 27 juillet 1884, mais pas par consentement mutuel. Les motifs invoqués pouvaient être l’adultère, par exemple, mais pas le consentement mutuel. Ceci explique alors que le mariage entre Anne Eteffe et François Villard, célébré le 12 juin 1873 à Roussac (Haute Vienne), ne pouvait pas être rompu légalement.  

Pour terminer, il est à noter que sur l'acte de décès d'Anne ETEFFE, le 30 juillet 1924 à Eguzon (Indre), celle-ci est mentionnée "épouse de François Villard".  La seule chose dont je suis à peu près sûr, depuis que j'ai pris connaissance de cette situation, c'est que je sais d'où viens le caractère trempé des 7 filles "Reby"… De leur grand-mère Anne ! 

Etymologie du nom Delage

Les "Delâge" de la branche de François DELÂGE ont un accent circonflexe sur le "a".  Cette orthographe est plus conforme à l'étymologie du nom.  En vérité nous devrions, nous aussi, avoir un accent circonflexe sur le "a".  En patois limousin, une "age" est une haie. On trouve beaucoup de lieux-dits portant le nom de "âge", notamment "l'Âge Barrière" à Saint Ouën sur Gartempe (Haute Vienne), le "Puy de l'Âge" à Celon (Indre), "l'Âge Quatre Maut" à Crozant (Creuse), "l'Âge Pourret" à Bazelat (Creuse) ou "le barrage de l'Âge" sur la Creuse, à La Celle Dunoise, pour ne citer que ceux-là. Un "Delage" est donc une personne qui habite près d'une haie, soit près "de la age" qui donne "Delaage". La suppression d'un "a" à fait ajouter l'accent. 

Sources: Alain Delage