3 mars 2000

Jean Delage (1931-2004) et Berthe Garcin (1915-1998)

(Mise à jour: 20/2/2022)
Jean et Michel Delage, lors du mariage de la petite fille
de ce dernier, Audrey Delage en Juillet 2003

Deuxième enfant d'une fraterie de quatre, Jean DELAGE est le premier fils d'un couple de coiffeurs-cafetiers, René Delage (1903-1992) et Denise Reby (1910-1993). Comme ses freres et soeur, il nait dans l'entre-deux guerres, le 18 fevrier 1931, dans ce qui est alors le fief familial : la campagne castelroussine. 

Du plus loin que l’on fasse des recherches, les ascendants de Jean DELAGE sont tous originaires du département de l’Indre. Cette ancienne province du Berry, et plus particulièrement du Bas-Berry, est toute proche de la célèbre Vallée Noire, chère à Georges Sand. Si on reste sur la lignée directe des "Delage", le berceau de cette famille est la paroisse de Chavin où l’on trouve le premier acte connu, c’est à dire celui du baptême de Gabriel DELAGE, le 1er avril 1668, fils d’Etienne DELAGE et d’Andrée GIRAUD. Ensuite la famille se déplace de quelques kilomètres pour aller à Malicornay, en la personne de Léonard DELAGE, né à Chavin le 19 mai 1780 et décédé le 15 mars 1845 à Malicornay.Il faudra attendre la fin du 19ème et le début du 20ème siècle pour que Sylvain DELAGE, né à Malicornay le 15 mai 1858, ne se déplace vers la commune de Bazaiges, où il y est décédé le 23 novembre 1936. 

Mais la famille de Jean va rompre avec cette tradition sedentaire. A l'instar de Rene et Denise, la famille va migrer vers le Languedoc, dans un premier temps, avant d'essaimer differentes regions du Sud de la France. Il fraudra toutefois attendre la fin de la seconde guerre mondiale pour que ce flux migratoire debute. Lorsque la guerre eclate, la fraterie est encore basee a Chateauroux et comprend donc: 
  • Annette (1928-2003) 
  • Jean (1931-2004) 
  • Jacques (1932-1981) 
  • Michel (1935-) 
Jean a trois ans 
Jean avec sa soeur Annette et Jacques
Jean a neuf ans
Communion solennelle

Pendant le conflit, Châteauroux subit plusieurs bombardements. Pour protéger la famille, le couple envoie ses enfants à la campagne. Ainsi, Annette s’est retrouvée à Eguzon, chez ses grands-parents maternels Félicien Reby et Marie Villard ; Jean et Jacques ont été placés à Chambord, ferme sur la commune de Bazaiges (Indre), chez le frère de René: Pierre Delage et Marie Burat. Quant au petit dernier, Michel, âgé de tout juste de 5 ans, il a été placé chez une sœur de René, Claire Delage et Gustave Blondet, près d’Argenton-sur-Creuse. 

Malgre la gravite de ce qu'il se passe autour d'eux, Jean et Jacques ont l'insousciance de leur age. Du haut de leurs dizaine d'annees, ils faisaient les 400 coups ensemble dans les pres et sous-bois, taquinant le betail ici, derangeant un paysan avec une fronde la ou encore enduisant avec de la bouse de vache la main-courante du pont pour que ledit paysan se souille la main lorsqu'il rentrerait la nuit... Il faut dire qu’ils n’avaient que 17 mois de différence et que Jean avait une certaine influence sur son frere Jacques, qui le suivait sans sourciller, mais toujours de bon gre. 

A l'armistice, la famille decide donc de vendre leur fond de commerce a Chateauroux, et de reprendre un hotel a Narbonne. Les enfants sont adolescents, et vivent assez mal le déracinement. Ils laissent derriere eux leurs familles, les amis, leurs habitudes... Et a l'arrivee les conditions ne sont pas des plus enthousiasmantes. On leur fait clairement comprendre qu'ils sont des enfants de la campagne qui debarquent dans une nouvelle ville. Mais ils sont la pour y refaire leur vie, a la sueur de leur front... Et tous y contribueront. Le Certificat d'Etudes en poche, Jean et Jacques vont donc rapidement arreter l'ecole pour entreprendre l’apprentissage de la pâtisserie. Ils vont le faire ensemble, notamment à Béziers. Jacques racontait qu’ils étaient logés dans une seule chambre et que dans le même immeuble travaillaient des prostitués. Elles les avaient pris en estime et c’est elles qui leur lavaient le linge.

C'est a Grenoble que Jean va etre appele a faire son service millitaire dans les chasseurs alpins. Si sa caserne est en centre ville, sur l'emplacement de l'actuel Parc Pompidou, il sera notamment base au camp des "Rochilles, au col du Télégraphe (entre Bourg d'Oisans et la Maurienne en Savoie) et dans le Trieves, ou il opere comme cuisinier durant les manoeuvres.     

Février 1952 à Aspres sur Buëch (Hautes Alpes), pendant son service militaire 

Ce n'est pourtant pas le gout du ski de randonnee, ni l'appel du grand air qui vont motiver Jean a rester dans la region une fois son service termine… Lors d'une permission, il rencontre en effet Berthe, son ainee de seize ans, qui vit a Grenoble. Il m'expliqua, plein de malice, que ce qu'il l'avait seduit c'etait le regard rieur de ma grand-mere… Il pretendait qu'elle arrivait a rire d'un oeil, et force est de constater que ce portrait lui donne raison: 


Il faut dire qu'elle a du rire souvent, tant Jean etait enclin aux pitreries. Un jour, il proposa a Berthe d'aller a Narbonne pour lui presenter ses parents… Pendant le trajet, il lui fit croire qu'il etait issu d'une famille gitane, et pour etayer sa blague  en arrivant en gare de Narbonne, il n'hesita pas a monter dans une des nombreuses roulottes qui patrouillaient le sud de la France a l'epoque. Elle fut pour le moins surprise… Mais cela a donne le ton pour le reste de leur union. Et le 28 novembre 1952, Jean epousa a Grenoble Berthe Garcin (1915-1998).

Jean et Berthe en 1952 

Nee le 17 janvier 1915 a Saint Sebastien (38), Berthe est la fille ainee de Albert Garcin et Rosa Maria Beaume. Originaires du Trieves, Berthe et sa soeur Claire ont grandi elles-aussi dans un cadre rural puisque leurs parents exploitaient une petite ferme sur ce plateau au Sud Dauphine. Elles ont pour autant étudié, en rejoignant l'etablissement scolaire du Château a La Mure jusqu'à l'obtention de leur brevet 1 et 2. Comme la ville etait trop loin de leur domicile et que le college de jeunes filles n'offraient pas l'internat, elles étaient logées chez l'habitant et ne voyaient leur mere qu'au gre de ses passages aux marches du village, et leur pere encore moins souvent. 


Une fois ses etudes finies, Berthe part s'installer a Grenoble, et sera suivie par sa soeur qui avait reussi le concours des Postes. Berthe travaille elle alors comme aide menagere dans differentes familles, puis comme secretaire chez un avoue, Maitre Daspre, et enfin dans une epicerie-comptoire. A la vente de l'exploitation de Saint Sebastien, les parents rejoignent les filles desormais independantes, et descendent s'installer a Grenoble. En 1952, lorsque Jean et Berthe se marient, ils s'installent rue Gabriel Péri. Ils avaient bien comme projet d'acheter une pâtisserie rue du Breuil à La Mure mais par manque de soutien financier de la famille Garcin, cela ne se fera finalement pas. 

Presidant la table, Berthe et Jean Delage, entoures de leurs famille
 A gauche, assis, Rene Delage A gauche de la mariee, Rosa Garcin 
 Derriere les maries, Claire Garcin 
 A droite du marie, Denise Delage 
 Assis a droite, Albert Garcin 
 Les autres, des cousins de la famille Beaume 
Jean et Berthe, a droite, accompagnant Denise et Rene Delage
et des amis dans les rues Grenoble en 1952
Jean et Berthe avec les parents Garcin sur le nouveau pont reliant
 La Mure à St Jean d'Hérans (le pont de Ponsonnas).
 La voiture est belle, elle ne sortait pas souvent du garage. 

Jean et Berthe auront trois filles qu'ils verront grandir a Grenoble, tout en passant du temps dans les familles respectives (Narbonne, Beziers, Mens, Saint Jean d'Herans): 
  • Michelle (1953) 
  • Monique (1954) 
  • Marie-Helene, dite 'Lilou' (1957) 
Comme la famille a emménage rue Edouard Vaillant vers 1955-56, les filles iront à l'école maternelle Ferdinand Buisson. La famille n'a pas beaucoup de moyens mais vit decemment. On est au coeur des Trente Glorieuses. C'est le plein emploi et l'avenement des conges payes. C'est aussi une epoque ou l'on se satisfait de peu. A la plus grande joie de ses filles, Jean avait reproduit sur les murs de la salle de bain des immenses peintures de Dingo et Pluto, les personnages de Disney. Un matin de Noël, trois poupées attendaient les filles sur le canapé. Il s'agissait de poupees Bella qui parlaient, buvaient... Faisaient pipi. Un enorme investissement a n'en pas douter. D'ailleurs les filles ont gardé ces jouets tres longtemps... même si celle de Michelle fut surnommee Bel Oeil car elle avait toujours un oeil fermé ! Cette poupee cligne toujours de l'oeil dans l'appartement de Seyssins aujourd'hui. 
St Jean D'Herans, Jean et Berthe apres la naissance de leur fille ainee, Michelle (1953) 
St Jean d'Herans, le couple avec Michelle et Monique 
St Jean d'Herans, Jean avec Michelle et Monique 
Jean supervisant Marie-Helene, Monique, leur cousin Gerard et Michelle

Les trois fillles avec leur grand-mere Garcin.
Les filles avec leur mere. 

Apres la naissance des filles, Berthe s'arrête de travailler, meme si elle continuera a faire occasionellement l'entretien de bureaux (a la Société Générale, place Gustave Rivet ; dans les locaux de la Poste-Centrale). C'est donc a Jean qu'incombe la tache de generer les revenus du foyer. Mais si c'est bien lui qui travaille, Berthe, elle, gere les finances de la famille. 

Apres son service militaire, Jean a d'abord occupé un emploi de pâtissier dans l'usine Brun sur St Martin d'Hères mais après avoir connu des grèves importantes dans les années 1956/57, il doit se reconvertir en chauffeur poids lourds. D'abord pour André, dont l'entrepôt était situé vers le lycée Mounier, il fait alors des liaisons Grenoble-Paris deux voire trois fois par semaine dans des conditions épiques. Il rejoint ensuite Pataud où il travaille dans le fret international. Il part souvent pour le Portugal, l'Espagne mais aussi dans les pays de l'Est (surtout la Tchécoslovaquie). En pleine Guerre Froide, il est escorté dès la frontière par l'armée jusqu'a la livraison de ses silos à grains en convoi exceptionnel. 
Jean dans les annees 60 a Annecy

Pour avoir de la compagnie, mais aussi sans doute pour alleger la charge de la garde, il lui arrivait d'emmener une de ses filles avec lui. C'etait une vraie aventure pour les enfants, meme si le tourisme n'etait pas forcément au rendez-vous et que les conditions de voyages n'etaient pas des plus confortables. Mon grand pere me racontait que lors de ces grands trajets internationaux il dormait plus volontiers a meme le sol, sous le camion, pour etre au frais plutot que dans l'etuve qu'etait sa cabine. 

C'est a cette epoque qu'il a eu son premier très gros accident. Alors qu'il etait a proximite d'une remorque, le contenu de celle-ci s'est décharge sur lui : plusieurs côtes cassées et un pronostique vital engagé... Il passa plusieurs semaines a l'hopital. Il rejoindra plus tard Experton toujours dans le transport de produits de métallurgie, mais il ne fait plus que de petits trajets et rentre desormais tous les soirs, et parfois meme le midi. Je me souviens d'ailleurs de le voir faire religieusement sa pause a la maison : apres le dejeuner, une cigarette Gauloises Bleues fumee au balcon avant de s'assoupir sur le canape du salon, ses mains en guise d'oreiller, pour une petite demie-heure avant de reprendre la route. 

Alors qu'il travaillait chez Giraud Motoculture, il eut un second accident du travail et faillit perdre sa jambe apres que la charge d'un poids lourd ne lui soit a nouveau tombee dessus. A sa sortie de l'hopital il fut mis en pre-retraite… Une decision qu'il avait eu du mal a accepter, lui qui travaillait depuis son adolescence. 

Jean arrivant à la biscuiterie Brun en vélo en janvier 1956
Marie-Helene sur le camion de son pere. 

Depuis l'ete 1965, la famille vit rue Franklin dans une maison achetee aux encheres pour la "modique" somme de 10 millions de Francs et avec un credit qui frolait les 14 %... Pour aider au remboursement des traites, ils louent certaines chambres de la maison a des etudiants de passage a Grenoble, et le feront jusqu'a la vente de la maison dans les annees 90. Les filles frequenteront le college Des Eaux Claires dans lequel je ferai mon lycee une generation plus tard. Michelle et Monique rejoindront ensuite le Lycee Louise Michel pour obtenir respectivement un BEP de secretariat et un Bac B. La cadette, Lilou, continuera ses etudes dans le meme lycee alors supervise par la plus jeune proviseur de France. Peut etre inspiree par ce modele feminin, elle continuera ses etudes et rejoindra l'INSA de Lyon pour y etudier le genie civil. 

Au cours de leur scolarite, les ainees passerent plusieurs etes de suite a Narbonne. Mais ce n'etait pas vraiment des vacances : si elles sont dans le sud, c'est pour aider leurs grands-parents a la gestion de l'hotel. En deux mois sur place, elles n'ont pu en tout est pour tout aller qu'une après-midi à la plage, et encore sur insistance de la grand-mère. Le matin elles faisaient les chambres (ménage, lit...). A midi il fallait servir les quelques clients qui dejeunaient dans la salle du restaurant: principalement des pensionnaires et des personnes qui venaient voir de la famille hospitalisée (l'hôtel se trouvait à côté d'une clinique). L'après-midi, c'etait un bref repos avant de commencer la préparation du diner. Le soir Michelle était en salle où après avoir servi les repas elle jouait de l'accordéon tandis que Monique etait à la plonge ou en cuisine avec son grand-père. Compatissante, la grand-mère doublait les pourboires afin que les filles se fassent un peu d'argent de poche. L'ete suivant Michelle ira aussi travaillé chez sa tante Annette qui tenait une charcuterie a Revel. Bref, le sens du labeur s'apprend jeune dans cette branche de la famille.

En 1972, Jacques et sa famille viennent a Grenoble pour rendre visite a leurs cousines. Si Alain est absent (service militaire?), Jacqueline et Maurice avaient emmene leur chien Dick qui a la vue du chien de la famille grenobloise, Pipo, s’est mis a aboyer si fort que les enfants se sont refugies sur les chaises du salon jusqu’a que cela se tasse… Ce sur quoi, Maurice qui était un fan de la serie televisee "L’Homme Invisible" demanda si une voiture invisble cela existait… La ou quelques instants plus tot la Citroen ID de Jean était encore garee se trouvait desormais une place de parking… vide. Profitant du remue-ménage, quelqu’un venait de voler la voiture. Jean et son frere partirent a la recherche de la voiture, roulant tellement vite que Jacques se sentit mal. Marie-Helene, Monique et leur cousine Jacqueline, parties en ville entre temps, faisaient des blagues en appelant la maison sans parler… Du coup, ceux restes a la maison pensaient que c’etaient les voleurs de la voiture qui les harcelaient… Finalement, c’est Bernard et Michelle qui retrouveront la voiture le lendemain, abandonnée non loin de leur lieu de travail.
Jean et Berthe à la naissance de leur premier petit enfant, Cédric, en Juillet 1976

En 1979, alors que mon frere vient de naitre, Jean et Berthe m'emmenent en vacances a Valras-Plage, dans la maison de Jacques et Lucette. Deux anecdotes sont associees a ce sejour languedocien, que mes grands parents me rappelaient de temps a autre : 
  • Sur place nous etions alles dejeuner a une brasserie locale, chez Gegene. Et du coup, sans... gene, j'aurais attrappe couteau et fourchette dans chaque main, afin de les tambouriner sur la table en exigeant: "On veut des frites, on veut des frites..."
  • Sur le chemin du retour, fort de mon stage linguistique et de mes connaissances profondes dans la faune alpine, je me serais exclame en voyant des arbres sur les cretes des colines : "Vindiou, pépé ! J’ai vu des cerfs la haut". J'avais trois ans a ma decharge...
S'ils ont souvent emprunte la Nationale Sept, c'est un autre voyage qui les aura sans doute le plus marques : un sejour au Cameroun ou ils renderent visite a Marie-Helene et Philippe, alors en collaboration (1980-82). Jean et Berthe avaient accompagne la maman de Philippe, Colette. A posteriori, Jean parlait souvent des animaux sauvages, des parties de chasse en Renault 4L, des cases, des bestioles qui grouillaient la nuit... Ils avaient aussi ete charges par des elephants dans leur petite voiture, et avaient pris en stop un marabout local qui selon toutes vraisemblances ne portait pas de slip sous son gandoura... Ce voyage les aura sans nul doute marque car c'etait le plus loin qu'ils ne soient alles.

En 1982/83, ils construisent un chalet vers Laffrey, sur la commune des Theneaux, pour avoir une residence secondaire. Ils le revendront quelques annees plus tard pour investir dans un studio a La Morte et un autre au Cap d'Agde. Si le premier n'a vocation qu'a etre utilise que pour des locations saisonnieres, celui dans l'Herault leur permettra surtout de se rapprocher de la famille de Jean.
Cedric a la (de)construction d’un muret au Chalet de Laffrey, sous le regard attendri de Jean et du chien Pipo
Jean et Berthe au chalet de La Morte avec leur fille Michelle
et l'oncle Michel et son epouse Liliane
 

Le Cap d'Agde n'est en effet pas tres loin de Beziers ou les parents de Jean sont desormais en retraite. Le Cap est une ville nouvelle, construite en front de mer a proximite de l'embouchure de l'Herault, et c'est un peu aussi une ville morte pendant la basse saison. Cela n'empeche pas Jean de se lier d'amitie avec les saisonniers et les autres residants, enchainant les parties de peche en bateau comme dans le port. Il aide au bar, a la plonge et au service dans certains restaurants pour le plaisir d'etre utile et d'avoir de la compagnie... Lors des vacances de Toussaint ou de Paques, les petits enfants y etaient d'ailleurs toujours les bienvenus pour tenter d'attraper des gobies, ces poissons communs, peu gouteux, pleins d'arretes, mais que Jean ne refusait jamais d'écailler.  Berthe en profitait pour nous apprendre a jouer a la belote ou nous gardait a l'oeil quand on s’essayait au skateboard sur le parking de la residence.
Jean au Cap d'Agde, amusant la gallerie avec un preservatif sur la tete,
ou sur le pont avec M. Echeyne, son
 copain de peche
Berthe et Raoul Chambaz pour leurs 80 ans. Jean et son frere Michel a Bezier.

Si nous leur avons souvent rendu visite au Cap D'Agde, il n'etait pas rare que mon frere et moi passions du temps rue Franklin, notamment quand Bernard et Michelle firent eux aussi le voyage jusqu'au Cameroun. C'etait l'occasion d'aider dans le potager, de manger des mures ou des raisins qui grimpaient le long du balcon, de fouiller les combles a la recherche de tresors, de bricoler dans le garage de la maison dans lequel s'accumulaient ferrailles et morceaux de bois. Jean avait un talent de bricoleur indeniable, capable de redonner vie a un vieux frigo ou un lave-linge qu'il avait recupere a la casse. Il aimait faire plaisir aux petits enfants avec des cadeaux fait main, sans doute parce qu'il ne pouvait se permettre plus. Il a toujours etait present, participant meme a la vie associative, servant certain weekend de chauffeur a mon equipe de volleyball, entassee dans sa Citroen BX pour aller disputer un match dans l'agglomeration… 

Il avait d'ailleurs cette expression bien a lui, "aller donner la main" pour expliquer qu'il rendait service a quelqu'un… Et il aidait dans le quartier: ici a repeindre, la a faire le jardin ou aroser… Et il n'hesitait pas a me rappeler qu'etant petit j'essayais d'en faire de meme lorsque pendant des travaux au chalet des Theneaux je sortais une a une de la brouette les pierres qu'il avait ramassees en lui disant "Moi te l'aide Pepe, moi te l'aide". 

Enfants, nous avions comme rituel de faire la tournee des grands parents le dimanche soir en descendant du chalet. Invariablement au moment du depart, nous attendions avec une impatience a peine dissimulee le moment ou la voiture allait partir et que Jean commencerait a nous courir apres, gesticulant comme un pantin desarticule et criant "Nom de Diu de nom de Diu", tandis que Berthe regarderait depuis le balcon, souriante a cette scene repetee chaque semaine. Comme je le disais plus haut, il aimait faire le pitre, et des blagues... D'une main il s'ébouriffait les cheveux, de l'autre il retirait son dentier, et le voila a califourchon sur son fauteuil prétendant s'être transforme en monstre pour effrayer ses petits enfants. Mon cousin Benoit me rappelle qu'a la suite d'une chute en vélo, il s'était fait mal a l'entre-jambe, et mon grand-père lui avait du coup conseille de se frotter la zone en question avec des orties pour faire passer la douleur. Il a fallu une maman bienveillante et accoutumée aux blagues de son pere pour éviter a mon cousin une surprise bien démangeante...

Berthe contractera la maladie de Parkinson et Jean s'occupera d'elle jusqu'a son deces en 1998 a Grenoble. Elle avait 83 ans. Lui-meme decedera le 5 septembre 2004 et sera enterre a ses cotes dans le cimetiere de Saint Jean d'Herans. Lors de la messe, on joua la chanson du languedocien Georges Brassens "Les Copains d'Abord", ce qui ne pouvait pas etre plus a propos.

Sources: 
Alain Delage
Michelle, Monique et Lilou Delage
Lucette Delage

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